Le Roi Soleil enflamme Paris
LAURENCE BERTELS
Le spectacle musical de Kamel Ouali, Dove Attia et Albert Cohen fait un tabac. Flamboyance pour un divertissement de qualité. A voir à Bruxelles en avril.
ENVOYÉE SPÉCIALE À PARIS
Flashes incessants, affluence du public vers la scène pour s'approcher de Louis XIV réincarné en Emmanuel Moire ou de la candide Marie Mancini (lumineuse Anne-Laure Girbal), fans piétinant à la sortie du Palais des Sports... C'est peu d'écrire que le «Roi Soleil», nouvel opus d'Albert Cohen et de Dove Attia («Les Dix Commandements» et «Autant en Emporte le vent») enflamme Paris. Et ce, avec d'autant plus de chaleur que le metteur en scène et chorégraphe Kamel Ouali, bien connu des amateurs de la Star'Ac, est venu mettre le feu aux poudres. Pour la bonne cause, celle du divertissement de qualité.
Faste, flamboyance, bande sonore pop-rock teintée de musique baroque sous la direction musicale de Dove Attia, écriture serrée, dramaturgie soignée, quatuor live et chorégraphie contemporanéisée, tout y est. Même et surtout l'interprétation de chanteurs et comédiens triés sur le volet et sélectionnés après... 700 auditions et 6000 candidatures.
Dove Attia, Albert Cohen et Kamel Ouali ont placé la barre presque aussi haut que Louis XIV lorsqu'il décida de construire Versailles, en risquant, comme le Roi Soleil, de ruiner le peuple, le prix des places allant jusqu'à 59 euros.
Mais puisqu'il paraît que les enfants adorent, que les histoires de rois, de princesses, d'amour et de château continuent à les faire rêver et que les mamans -ferventes admiratrices d'Emmanuel Moire et de Kamel Ouali- croient ainsi raconter l'histoire de France à leur chère progéniture, chacun, si l'on ose dire, y trouve son compte. Même - et sans doute surtout - les producteurs qui ont cependant pris au départ un énorme risque financier, le coût de la production s'élevant à 5 millions d'euros alors que la comédie musicale sort de cinq années de marasme.
Spectacle total
Dans le genre, attendu, populaire, standardisé, et canalisé, le spectacle, il est vrai, est total. La scénographie et les décors d'Alain Lagarde sont fabuleux et contribuent, au même titre que les somptueux costumes de Dominique Borg («Camille Claudel», «Pacte des loups»), à la féerie de l'ensemble. Sans oublier le propos, riche, romancé, serré, étudié et dramatisé. Savant mélange entre la comédie musicale et la pièce théâtrale, «Le Roi Soleil» raconte une histoire passionnante, celle du plus grand roi de France, de ses doutes, de ses amours et de sa mégalomanie. Avec une prédominance pour l'aspect sentimental de «l'affaire». Nous voici donc désormais incollables sur le rôle de la modeste Marie Mancini que le Roi voulait épouser, de la sulfureuse Madame de Montespan - une Lysa Ansaldi grave, diabolique, ambiguë et impérieuse à souhait - ou de Françoise de Maintenon, fille d'assassin, gouvernante et dernier amour d'un roi qui compta plus souvent fleurette qu'à son tour.
Le producteur Albert Cohen avoue, lui, avoir eu peur au début des réservations. Mais le bouche à oreille a fonctionné et l'album a cartonné avec 450000 exemplaires vendus, dans la lignée de «Notre-Dame». Actuellement à Paris, la comédie musicale partira en tournée en janvier et fera escale à Forest National en avril. En automne, le spectacle sera à nouveau à Paris pour une version revue avant de repartir vers d'autres aventures.
C'est que l'Histoire de France fait toujours recette surtout lorsqu'elle est introduite par Molière, figure incontournable du règne de Louis XIV. Après une mise en bouche théâtrale, place à la première fronde populaire.
Révélation
Suivra le magnifique sacre de Louis XIV, d'intéressants tableaux latéraux, un début de deuxième acte dramatique et sincère ainsi qu'une alternance de danses d'époque, jazz, modernes ou hip hop qui rythment un ensemble festif. Le tout servi, ne l'oublions surtout pas, par une distribution de haut vol (une cinquantaine d'artistes et autant de techniciens) avec un Emmanuel Moire juste, posé, adoré par le public, mais un peu froid, un Christophe Mae, frère du roi salutaire, à contre-pied des autres chanteurs, trublion venu chaque fois booster le spectacle au point d'avoir perdu sept kilos depuis le début des représentations parisiennes et une révélation, Victoria Petrosillo dans le rôle d'Isabelle, fille du peuple à la voix pleine de grain. On en frémirait presque.
A Bruxelles, les 21 et 22 avril. Rens.: 0900.00.456 ou Webwww.sherpa.be ou Webwww.leroisoleil.fr
© La Libre Belgique 2005
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